Jean-Marie épouse Jeanne le 29 septembre 1945 à Sennecey-le-Grand et ils ont 3 enfants : Monique, née le 31 juillet 1946, atteinte de la maladie bleue, qui décède le 5 du mois suivant, Nicole, née le 3 décembre 1948 et Chantal, née le 31 janvier 1950.
Jean-Marie est un bon maçon, mais il sait, aussi, bien " faire le mur ", il quitte le foyer conjugal en 19xx et pendant xx ans, Jeanne fait bouillir la marmite ; elle travaille à la poste de Sennecey-le-grand et les filles apprennent vite la solidarité et participent aux tâches ménagères.
A son retour, Jeanne entend bien lui faire comprendre qu'il ne doit pas se comporter en simple visiteur de passage et qu'il doit se faire pardonner, se racheter ;
Elles le punissent bien en lui prouvant chaque jour combien elle ont très bien su se débrouiller sans lui.

Les grands-parents maternels
de mon Papa

Mémé et Pépé Jaillet

Jean-Claude DELHOMME, est né le 13 août 1891 à Jully les Buxy (Saône et Loire). Il est le frère xxxxx de deux sœurs, Marie et Jeanne. Leur père était ouvrier journalier dans des fermes.
Marie-Louise PRIVEL est née à Sennecey-le-Grand (Saône et Loire), le 24 janvier 1897, dans une famille de 3 garçons, Marcel, Henri et Pierre, et d'une mère qui faisait des lessives chez les gens pour faire vivre sa famille. Le père a été renversé par l'unique voiture du village, en voulant sauver son chien.

Il s'épousent en 19xx. Elle est rempailleuse de chaises lorsqu'il part à la guerre en 1914, quand il revient il est ouvrier en scierie, maçon, couvreur (ballastre).

Jean-Marie JAILLET, est né en 1886 à Montrey, en Bresse. Il a été soutien d'une famille nombreuse et n'est pas parti à la guerre, il fût entrepreneur de carrière, il vendait ses cailloux. Il croise la route de Léontine GRAND, née en 1894 à Paris, de l'Assistance Publique. Ils s'épousent en 1916/17 à Nanton et ils ont 4 enfants : Marie-Louise, Jean-Marie, Adolphine et Gabrielle.
L'ainé des garçons, Jean-Marie, est né le 18 mars 1918, à Nantan (Vincelles). Il est un enfant espiègle et il xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx.
En 1938, alors qu'il est soldat, le 1er sept. Régiment de Forteresse à Alkirch en Alsace il doit aller à la guerre de 1939 à 1945. Il est fait prisonnier. Il subit les humiliations et la faim, il n'a que des racines, des baies pour nourriture dans les tranchées, alors il ne faudra plus jamais lui proposer des groseilles, des mûres ou des xxxxxxxxxxx, même dans un yogourt crémeux.
De leur union naîtra Jeanne, le 12 juillet 1920, à Sennecey-le-Grand (Saône et Loire).
Elle grandit xxxxxxx xxxxxxxxxx Tout d'abord couturière, puis femme de ménage, elle rencontre l'homme de sa vie, un maçon à la fête de Jugy à Saint Germain.

Les filles grandissent, se marient. Chantal reste dans le coin, à Laives. Nicole habite à Juan-les-Pins, sur la côte.

Jean-Marie est toujours maçon et pompier volontaire. Il est également porte drapeau des anciens combattants.

Jean-Marie et Jeanne deviennent grands-parents. Marc, fils de Nicole et René, naît le 26 septembre 1968. Sylvie, fille de Chantal et Pierrot, naît le 30 septembre de l'année suivante.
Plus tard, Sébastien, second fils de l'aînée, naît le 1er septembre 1976, suivi de Franck, fils de la cadette, qui naît le 26 octobre 1978.

C'est un pépé farceur et joueur. Il est aussi très radin et ronchon. C'est vrai qu'il n'a jamais donné une seule pièce aux enfants pour aller à la fête en été. Mémé donne en cachette. Il est sans arrêt en train d'éteindre la lumière, même à la nuit tombée et il interdit le téléphone.
Mais il est généreux avec le cœur. Il est toujours prêt à rendre service. Il est naturellement courageux et serviable.

Il fait des travaux de grande envergure et fait profiter les siens de ses compétences professionnelles.

Ils prennent encore du grade et deviennent arrière-grands-parents le 25 mai 1995 avec Justine, la fille de Sylvie et son mari Jean-Luc, puis avec Anthony, le fils de Marc et sa compagne Nathalie, le 13 septembre 1996. Et Louis, le second de Sylvie, naît le 10 juin 1998.

Jean-Marie est toujours dehors à jardiner ou bricoler, à faire enrager les gosses.

Il adore caresser son chien Igor sur ses genoux et aller le promener à l'entour de son quatrier de Sens.
Par contre, il aime regarder la télé jusqu'à tard, mais pas les films d'action " c'est du ricain, c'est de la merde ".
Il préfère " les chiffres et les lettres " et " questions pour un champion ", " Ushuaia " et " Thalassa " et ne rate pas les informations de 13 h et de 20 h. Un match de temps en temps.
Il épluche son journal chaque jour et se plait à faire des commentaires.

Jean-Marie a un petit bout de terrain sur lequel il cultive des fruits et des légumes. Il fait pousser des pommes de terre, des fraises... " les p'tiots vont s'y régaler "

Il va à la pêche en saône.
Il ramasse des sauterelles en retrouvant un de ses coins gardés bien secrets et il pêche des chevennes et des brochets.

Il va faire son tour quotidien au marché. Il connaît tout le monde et tout le monde le connaît. Il taquine les dames.
Mémé ne va plus avec lui, c'est trop long !

Il y a toujours un gendarme, un pompier à la retraite ou en exercice, un collègue qui passe boire le café en début d'après-midi à la maison de Jean-Marie. Réputation oblige.
On aime sa compagnie, son humour et ses railleries.

Il est de toutes les fêtes de la commune ou du canton. Il lève le verre modérément, mais laisse piquer la fourchette.

A table, il aime grignoter dans les plats à peine posés et dans l'assiette du voisin.

Il fume la pipe longtemps et se met à rouler et fumer son tabac quand il commence à avoir des problèmes dentaires. Il fait des trous à toutes ses chemises et ses pantalons : la Jeanne n'a jamais fini de se mettre en colère !

Ils accueillent aux vacances tous leurs gamins, les grands comme les petits.
Mémé fait des bons petits plats : ses fameuses croquettes de pomme de terre !
Pépé adore se mêler aux conversations, faire des blagues, cacher des objets personnels... il amuse tout son public.

Mémé, Jeanne, a de quoi s'occuper, la cuisine, les arrières petits-enfants, ceux d'ici et les vacanciers ... et le Jean-Marie !
Elle a aussi ses chats, plusieurs douzaines ! ils sont malades et co-sanguinés. Pierrot en élimine souvent !
Pépé et elle ont en commun l'amour des animaux. Ils en passent du temps et des sous à les nourrir... même les oiseaux du ciel ont droit à leurs graines, en hiver !

Elle doit faire face au caractère du pépé Jean-Marie qui n'est pas facile et elle est fatiguée.
Elle est opérée du coeur le xx xxxxxxxxxxxxxx 19xx.

Pépé n'a aucun problème de santé jusqu'à ses 82 ans, mais tout à coup, c'est l'avalanche : une cirrhose... la circulation sanguine…
Jean-Marie, qui n'est pas facile à soigner, envoie valser la Jeanne, fatiguée de sa récente intervention chirurgicale et désormais astreinte de traitements médicaux.

En hiver 2002, ils ont tous deux une gastro qui n'en finit pas et les affaibli considérablement.
Ils ont bien changé, surtout pépé qui ne bouge presque plus de son fauteuil.

Mardi 25 février 2003, ça fait un bout de temps que le Jean-Marie va pas fort, la mémé s'en occupe comme elle peut, elle n'a plus de force et a mal aux épaules : " c'est qu'il faut le soulever, le bougre ".
Chantal qui s'occupe déjà, à la maison, de son époux, Pierrot, en convalescence, vient quasiment tous les jours, en sortant du travail et durant ses repos.
Des soins à domicile lui sont prodigués deux fois par semaine. Mais ce n'est pas suffisant, Jeanne doit le faire hospitaliser, elle ne peut plus le soulever et il se vide de son sang, il crache des morceaux de son foie.

Il est transporté à la clinique de St Remy, il ne veut pas aller à l'hôpital de Chalon.
Ses filles et sa femme sont auprès de lui, il est dans le coma, Sébastien (venu du Sud le jeudi, ainsi que sa mère) et Franck - les cousins inséparables - ses petits-fils, sont choqués de voir leur pépé dans cet état. Sylvie, sa petite-fille, aussi.
Le vieil homme, usé et amaigri, cherche sa respiration, c'est impressionnant, il est fiévreux, il commence à souffrir.

Vendredi 28 à 12 h, il cesse de respirer. Marc, l'aîné de ses petits-enfants, Nathalie sa compagne et Céline, celle de son frère cadet, montent en Bourgogne.

La maison du pépé est pleine... mais il y a un vide que chacun se surprend à ressentir immanquablement à tout moment, aux repas surtout.

Tous ensemble, samedi après-midi, vont saluer Jean-Marie à l'athanée. Tous les jeunes pleurent leur pépé de sang ou d'adoption. Pépé Taquin. Chacun y va d'un souvenir, d'une anecdote, il n'en manque pas.

Dimanche matin, Audrey, la compagne de Franck, le plus jeune de ses petits-enfants (fils de sa cadette) met au monde le quatrième arrière-petit-enfant du pépé Jean-Marie et de la mémé Jeanne. C'est Nathan. Il se porte bien et les parents aussi. Ce " ch'ti " ne connaîtra jamais ce fameux pépé mais en entendra beaucoup parler, c'est sûr !

Mardi 4 mars 2003, à 14 h, la famille est réunie à St Rémy pour la mise en bière, la sœur aînée de Jean-Marie, Marie-Louise, est venue de Paris avec son fils Rémy. Elle est bouleversée.

Une heure plus tard, le parvis de l'église de Sennecey est comblé d'amis du pépé.
Son corbillard est attendu par une haie d'honneur des pompiers en uniforme de cérémonie jusqu'aux escaliers. Les anciens combattants sont également au garde à vous.
Le drapeau du pépé est porté par un autre porte drapeau officiel.
Un gradé déplie un drapeau tricolore sur le cercueil du soldat combattant et déporté : Jean-Marie.

Six pompiers portent son cercueil jusqu'à l'autel. Ils traversent l'église au pas. Un silence émouvant règne et tous les regards fixent le cercueil ainsi honoré. Les pompiers sont assis à sa droite, avec les anciens combattants et huit gendarmes en uniforme, dont le colonel. La famille est à gauche.

La cérémonie religieuse se déroule dans la tristesse et le respect, il est fait lecture de la vie de Jean-Marie et il est particulièrement fait état de sa notoriété, de sa bonne humeur, de son côté bon samaritain et de ses exploits de soldat, de déporté, de pompier et de porte-drapeau volontaire et bénévole. Un hommage juste et mérité.
Céline porte le prénom sur l'autel, Sylvie pose 6 bougies allumées sur le haut de son cercueil et Marc lit une lettre émouvante et réaliste écrite par le papa d'Audrey, à la demande et au nom de la famille proche. Dans cet éloge, il est de nouveau souligné la personnalité, le tempérament du pépé et fait part du dommageable coup du sort de n'avoir pas pu se faire rencontrer le vieillard et le nouveau-né. Une mauvaise farce du destin.

Les pompiers signent le cercueil d'une branche de guis béni, puis les anciens combattants, les gendarmes et les amis. La famille à son tour, l'église vide, rend un dernier hommage. Jean-Marie, béni, est de nouveau porté par les pompiers, les yeux rougis, et rejoint le parvis jusqu'à sa voiture, entre les larmes et les embrassades de tous ceux qui l'aimaient et qui sont réunis.
Ici pas d'anonymes, tous le connaissaient.
Ici pas de personnes endimanchées pour la circonstance par simple politesse, respect, tradition ou curiosité, tous sont sincères et tristes.
Jean-Marie, c'est plus qu'une figure locale, c'est plus qu'un sacré farceur, c'est plus qu'un homme courageux et volontaire. C'est l'ami de toute une bourgade, des jeunes comme des vieux.
C'est la famille, ce sont les proches, les compagnons d'armes, les corporations volontaires et engagées, et les habitants de Sennecey-le-Grand, toutes générations confondues, qui sont en deuil.

Il aurait été content de voir tout ce monde, toutes ces fleurs et fier des hommages qui lui ont été rendus par les pompiers, les anciens combattants, les gendarmes...

Salut Pépé, salut Jean-Marie, repose en paix.