Pédophilie :
Le gouvernement s'attaque à la pornographie
infantile sur Internet, support numéro 1 en matière de réseau
pédophile.
La loi sur la grande criminalité destinée à lutter contre les "nouvelles mafias"
est en chantier.
Dans cette loi encore à l'état d'avant-projet, le ministre français de la
Justice vient de présenter le chapitre contre la cyber-pédocriminalité. Il
souhaite renforcer les peines sanctionnant la fabrication et la diffusion
de contenus pédophiles sur Internet.
Pour la seule année 2002, l'Office central de lutte contre la criminalité
liée aux technologies de l'information et de la communication a reçu pas moins
de 7 000 signalements de sites internet à caractère pédophile.
Fort de ce constat, le ministre a annoncé récemment un certain nombre de propositions
pour lutter contre la cyber-pédopornographie.
Ce dispositif législatif qui prévoit d'assimiler les réseaux pédophiles à
des bandes organisées, fait partie du projet de loi relatif à la lutte contre
les formes nouvelles de délinquance et de criminalité organisée.
Il appelle à agir sur plusieurs fronts :
- Aggravations des peines, renforcement de la surveillance téléphonique et
des messages électroniques et formation des magistrats en matière de cyber-pédopornographie.
L'examen du projet de loi devant le Parlement
:
Le premier volet de ce dispositif est destiné à renforcer les peines sanctionnant
la pédocriminalité et la diffusion de contenus pédophiles sur Internet.
Le texte prévoit d'"aggraver en les doublant les peines applicables pour les
délits de fabrication d'images pédo-pornographiques et de diffusion de contenus
pédophiles sur Internet".
Aujourd'hui, la fabrication et la diffusion d'images violentes ou pédo-pornographiques
sur Internet peut entraîner jusqu'à cinq ans d'emprisonnement, un quantum
qui serait par conséquent porté à 10 ans en cas d'adoption du projet. D'autre
part, une disposition qui donne la possibilité d'accéder directement et à
distance à des fichiers informatiques afin de faire avancer les enquêtes,
prévoit notamment des "interceptions de correspondances émises par la voie
des télécommunications téléphonique ou numériques".
La formation des magistrats en matière de cybercriminalité est le second volet
de ce plan d'action. Un domaine où il reste beaucoup à faire, puisque jusqu'à
présent la formation des magistrats se faisait essentiellement en interne.
Sur ce point, Dominique Perben a annoncé la mise en place au sein des cours
d'appel de Versailles et de Paris d'un pôle de magistrats spécialisés "se
consacrant essentiellement à la poursuite de ce type d'activités criminelles".
Depuis septembre 2002, une session de formation continue consacrée uniquement
à Internet est organisée à l'Ecole nationale de la magistrature de Bordeaux.
Parallèlement à ces dispositions, le gouvernement cherche à assurer un travail
de sensibilisation et de réflexion sur cette problématique en encourageant
les utilisateurs d'Internet à agir directement pour freiner la prolifération
de ce type d'information sur le réseau.
Dans cette perspective, le ministère de la Justice a ouvert un site sur Internet,
auprès duquel tout un chacun peut dénoncer les pages illicites qu'il a croisées
sur le Web (www.internet.mineurs.gouv.fr, très complet, ce site répertorie
également tous les textes de loi en la matière).
Parallèlement à cette réflexion nationale, une réflexion internationale est
menée pour harmoniser les réponses législatives dans ce domaine.
Les gouvernements de plusieurs pays, et notamment la France réfléchissent
à l'instauration de règles juridiques internationales.
La protection de l'enfance est au cœur des préoccupations des instances européennes :
Première étape de cette politique commune : le Conseil de l'Europe a adopté en novembre 2001 à Strasbourg, un traité qui permet à chaque Etat-membre de disposer d'une loi internationale sur laquelle fonder ses actions contre les cybercriminels, visant expressément la lutte contre la pornographie infantile sur Internet.
Le Vatican face à la pédophilie :
La mise en cause de plus en plus fréquente
de prêtres catholiques, y compris des prélats, dans des affaires de pédophilie
embarrasse le Saint-Siège qui ne peut plus, comme par le passé, opposer le
silence à ces accusations. L'évêque de Palm Beach, en Floride, est contraint
de démissionner pour des abus sexuels commis il y a 25 ans dans un séminaire.
Son prédécesseur avait connu le même destin en 1999.
A Cardiff, au Pays de Galles, l'archevêque contraint de présenter des excuses
publiques après le scandale provoqué par deux prêtres qui étaient sous son
autorité accusés de pédophilie.
En France, un évêque condamné à trois mois de prison avec sursis.
Enfin, tout récemment, le diocèse de Boston, aux Etats-Unis, littéralement
submergé par un scandale identique.
Autant de faits divers qui empêchent dorénavant de parler de cas isolés dans l'épineux dossier de la pédophilie dans l'Eglise.
Réunis en assemblée plénière à Lourdes, en
novembre 2000, les évêques de France avaient courageusement mis ce sujet à
leur ordre du jour.
Leur condamnation fut claire, tout comme leur appel à ne plus étouffer ce
type d'affaires, une pratique qui a longtemps prévalu, de l'aveu même de certains
grands prélats.
Le cardinal Law, archevêque de Boston et véritable pillier romain de l'épiscopat
américain, a ainsi de présenté lui aussi des excuses publiques, pour
avoir simplement transféré, et non dénoncé ni même suspendu, un prêtre pédophile
dont les agissements étaient connus au sein du diocèse.
Ce prêtre, actuellement incarcéré, aurait abusé de plus de 200 enfants.
Le diocèse de Boston vient d'être condamné à verser quelque 30 millions de
dollars aux famillles des victimes.
Au coût moral et d'image que ce genre d'affaires
provoque, s'ajoute désormais un coût économique lui aussi embarrassant. Ces
scandales à répétition soulèvent deux interrogations qui agitent à la fois
le monde ecclésial et la société civile.
La première porte sur les faits eux-mêmes, sur l'ampleur réel du phénomène
des déviances sexuelles au sein de l'Eglise.
La seconde, sur l'attitude des autorités ecclésiastiques vis-à-vis des fautifs
et des autorités judiciaires.
- Un évêque doit-il dénoncer ses prêtres ?
D'importants responsables de la Curie romaine, et le Pape en personne, ont
à plusieurs reprises dénoncé fortement le "cancer de la pédophilie".
Le Cardinal Lopez Trujillo, président du Conseil pontifical pour la famille,
le fit même très tôt, il y a plus de dix ans, en lançant l'alarme sur le tourisme
sexuel dans les pays asiatiques et en qualifiant même les actes pédophiles
de véritables "crimes contre l'humanité".
Mais la question des prêtres impliqués dans ce type de délit a suscité davantage
d'embarras. Le problème n'était pas ignoré, mais on constatait une évidente
réticence à prendre position publiquement. Il a fallu attendre l'an passé
pour qu'un document traite pour la première fois de ce sujet.
Un texte du Pape, un "motu proprio", dans
lequel Jean Paul II demande "aux évêques non seulement de contribuer à éviter
un crime aussi grave, mais aussi de protéger au moyen des sanctions nécessaires
la sainteté du sacerdoce".
Un véritable rappel à l'ordre qui, par ailleurs, confiait à la Congrégation
pour la doctrine de la foi une nouvelle mission : contrôler de plus près ce
phénomène. Les évêques devront faire un rapport à la congrégation romaine.
Voilà pour la gestion "interne" du problème.
Mais le document du Pape, et la lettre du cardinal Ratzinger qui l'accompagnait,
laissaient sans réponse la seconde question : un évêque, informé des agissements
d'un prêtre de son diocèse, doit-il ou non le dénoncer ?
Outre la question de conscience, qui n'est pas spécifique à l'évêque, ce point
soulève le problème de la juridiction.
Nul ne remet en cause l'existence du droit canon de l'Eglise.
Mais lorsque les faits relèvent du pénal, quelle valeur attribuer à cette
juridiction interne ?
Difficile d'apporter une réponse générale.
Les responsables de l'Eglise, à juste titre, soulignent volontiers que les
méfaits de certains prêtres ou religieux ne sauraient occulter l'engagement
charitable de centaines de milliers de serviteurs de l'Eglise.
Mais la série des faits divers est devenue trop longue, et certains silences
trop lourds, pour que l'Eglise ne ressente pas le besoin de lancer un signal
sans équivoque.
D'autant que dans le monde catholique, ces délits sexuels renforcent les tenants
du mariage des prêtres. Le journal du diocèse de Boston posait lui-même la
question au moment du procés.